24 octobre 2019

Faire une réflexion éthique c’est aussi être en mode solutionpar Comité d’Éthique et Déontologie

Nous poursuivons ce mois-ci notre intention de vous partager une situation concrète « d’auto-réflexion » éthique. Notre but n’est pas de donner un avis d’expert en éthique mais plutôt vous offrir des pistes qui, nous le souhaitons, pourront déclencher ou nourrir vos propres réflexions.

Philippe est un coach d’affaires qui intervient dans les grandes organisations. Le DRH d’une d’entre elles le contacte pour la demande suivante : Accompagner en coaching individuel les 4 membres d’un même comité de gestion dans le cadre de leur plan de développement. Ils ont tous été évalués quant à la maîtrise des compétences de leur fonction et, suite aux résultats, un plan de développement a été initié en collaboration avec leur conseiller RH. Pour chacun, le mandat prévoit une rencontre avec le VP de qui relèvent les directeurs pour connaître les grands objectifs de développement des compétences, une rencontre individuelle avec chaque gestionnaire pour préciser leurs objectifs respectifs, une rencontre tripartite avec le VP, une banque de 15h de coaching et une rencontre tripartite bilan.

Le mandat est directement dans les cordes de Philippe en plus d’être intéressant,  il l’accepte donc avec joie.

Au cours de la première rencontre avec le VP, celui-ci lui partage ses attentes, les enjeux de sa Vice-présidence, les défis individuels de chacun des directeurs en plus de son « opinion » sur le potentiel de chacun et ce qu’il considère comme étant des « non négociables » dans le cadre de leur développement.

Au sortir de cette rencontre, Philippe ressent un malaise, il ne s’explique pas pourquoi il se sent « dirigé », voir « contrôlé ». Trop excité par ces multiples mandats, Il repousse à plus tard sa réflexion sur le sujet.

Une semaine plus tard ont lieu les rencontres individuelles avec chacun des directeurs.  De chacun d’eux, au delà de connaître leurs enjeux et objectifs qui diffèrent de ceux énoncés par le VP, Philippe en apprendra sur l’état de leurs relations entre eux tous et sur celle avec leur VP.  Incohérences, divergences, collusions et manque de confiance ressortent comme caractéristiques du climat dans l’équipe.

Philippe termine sa tournée de rencontres avec en tête, des questions, des appréhensions et un sentiment de ne pas trop savoir comment il pourra exercer son rôle de coach. Bref, il se sent un peu perdu ; qu’est-ce qui est vrai? Qu’est-ce qu’il doit faire? Comment agir dans ce mandat?

Le malaise ressenti lors de sa rencontre avec le VP lui revenant en mémoire, Philippe arrive à son bureau et décide d’écrire tout ce qui accroche pour lui dans ce mandat et les questions qui en émergent :

  • Les discours, les enjeux et les objectifs diffèrent d’une personne à l’autre
  • Chacun a sa propre vision de son rôle
  • La bisbille semble exister entre les directeurs et avec le VP
  • Le climat entretenu est plutôt de type «  individualiste »
  •  

Alors,

  • « Qu’est-ce que je fais avec ces disparités? »
  • « Comment pourrai-je instaurer un climat de confiance avec chacun des directeurs sachant qu’ils ne se font pas confiance entre eux? »
  • « Comment ferai-je pour ne pas être influencé par les opinions de chacun sur les autres? Comment vais-je maintenir ma neutralité? »
  • « Quel est l’impact du fait que je sois le seul coach sur l’efficacité du coaching? »
  • Quelles sont mes valeurs professionnelles qui sont en jeu dans ce mandat? »

À cette dernière question Philippe s’aperçoit que ses valeurs de confiance, d’intégrité et de transparence sont en jeu. Comment être un coach confiant (en plus d’être responsable de l’établissement d’un climat de confiance), être intègre (en toute neutralité) et transparent dans un tel contexte?

LA grande question émerge : Comment accepter un tel mandat dans le respect de mes valeurs et le respect de la profession de coach?

Dès lors, ses pré-requis lui sont apparus évidents :

  1. « Je suis responsable de l’établissement d’un climat de confiance pour faciliter les apprentissages »
  2. « Je dois m’assurer d’éviter tout conflit d’intérêt et de préserver ma neutralité »
  3. « Je dois m’assurer de mettre en place les conditions qui assurent l’efficacité du processus de coaching »
  4. « Je dois pouvoir agir en toute confiance et me sentir solide pour accompagner mes clients »

À la lumière de ces éléments, Philippe se mit en mode solution et prit la décision qui s’imposait pour lui : Recommander l’intervention de 3 autres coachs dans le mandat pour que chaque directeur ait un coach « unique ». Il proposa un entretien au VP et au DRH pour expliquer son raisonnement, sa décision et en même temps, expliquer l’importance de la confiance et de la neutralité pour le succès d’un processus de coaching.

Philippe a donc dit « non » au mandat dans sa forme initiale et « oui » dans une formule renouvelée!

Et vous, qu’auriez vous fait et quel aurait été votre questionnement si vous aviez été dans cette situation ?

Merci de nous partager le fruit de vos réflexions en nous écrivant à deontologie@icf.org

N’hésitez pas à faire appel à nous si vous avez besoin d’aide dans vos réflexions et décisions éthiques.

Votre comité de déontologie : Mireille Nadeau, Lyne Leblanc, Nathalie Dubé

Comité d’Éthique et Déontologie ICF Québec